interview

Isabelle MAURON est membre fondateur de l’association. Nous la connaissons bien, mais nous aimerions vous la présenter.

Isabelle, pourquoi es-tu autant engagée dans l’association SolAir ?

Je suis Dys  et psychomotricienne. Je suis aussi maman solo de 2 enfants. On voit de plus en plus de témoignages de personne en situation de handicap qui réussisse et je trouve cela très bien et valorisant.

Dans ma perception, mon parcours de vie serait plutôt « chaotique », mais aussi intense et passionnant. C’est ce qui explique mon engagement !

ETAPE 1 : L’école primaire, j’ai de super souvenir, des amis, je suis pleine de vie et d’envie. Je suis quand même obligée de suivre des « cours particuliers » avec la femme du directeur de l’école pour apprendre à lire et écrire plus vite et je suis également des séances d’orthophonie. Pourtant on me dit que j’ai une très belle écriture quand je m’applique.

ETAPE 2 : La 5e : « idiote », voilà ce que me dit mon professeur de Mathématique. À ceci s’ajoutent les notes négatives (les -10/20 !) en dictée et mon incapacité à comprendre quoi que ce soit en allemand…Alors qu’en 6ème j’avais 17/20 de moyenne.

Je ne comprends rien…Mais vraiment plus rien. Tout s’accélère. Je rêve que je suis bilingue, c’est un objectif, mais personne ne le voit.

Mes parents m’encouragent, ils me disent que je suis « intelligente ».

Oui, ok il y a 8 formes d’intelligence…Mais non, je ne me sens pas intelligente du tout…..Comment je pourrais être intelligente au vu de mon incapacité à réussir, à performer à l’école. Mes parents ne comprennent rien de toute façon….

Pourtant au fond de moi je veux réussir, pour moi, pour mes parents et leur montrer qu’ils ont raison et qu’ils peuvent être fiers, mais je n’y arrive pas.

Je passe des heures devant mon bureau….à regarder mon bureau….avec la sensation d’avoir travaillé dur….Mais comme je ne sais pas m’y prendre, comme je ne sais pas apprendre, les notes dégringolent.

Mon prof de math a raison, je suis « débile », en même temps c’est lui l’adulte, le sachant, l’expert !

« J’ai perdu confiance »

J’ai aussi perdu l’envie de travailler (pas mes rêves ils étaient toujours là et d’ailleurs aujourd’hui je parle anglais, et même espagnole car je suis allée vivre 2 ans à Londres et à Madrid).

J’ai commencé à être un peu clown, beaucoup rebelle.

J’ai cependant obtenu mon brevet.

La seconde…Une seconde chance…Non la continuité…Enchaînement d’absence, mais en vrai j’ai adoré la philo et la science économique et sociale. Mais cela personne ne pouvait le savoir, c’était hors de question ! J’étais débile et rebelle, donc inapte à étudier !

Puis j’ai raté mon bac, à l’époque je ne suis même pas allé voir les résultats. À quoi bon. Mais rassurez-vous, m’a vie n’était pas triste et j’ai beaucoup fêté le bac de mes amis ! (J’ai gardé un petit côté clown, avec un sourire sur les lèvres pour cacher mes difficultés…)

En parallèle je réussissais mon brevet de pilote en parapente puis  mon permis de conduire, mon BAFA, 

J’ai toujours travaillé. J’ai voyagé. J’aime dire que j’ai déjà eu plusieurs vies !  J’ai aussi été secrétaire administrative à la DDASS. Mes chefs étaient géniaux, bienveillants et quand j’ai décidé de reprendre mes études ils m’ont encouragé ce qui m’a permis de passer à l’étape 3 !

ETAPE 3 : Validation des acquis de l’expérience et j’ai obtenu un bac pro secrétariat.

ETAPE 4 : 6 mois de préparation au concours de psychomotricien. Et à cette époque, j’avais déjà 2 enfants en bas âge.

ETAPE 5 : Congratulation ! J’ai obtenu mon concours du premier coup et sur liste principale.

Finalement je ne suis peut-être pas « idiote » ?

Quand je mets du sens sur ce que je fais je réussis ? J’ai appris seule l’anglais et l’Espagnole, j’ai un brevet de pilote et maintenant je viens de réussir un concours…. Ma confiance en moi n’est quand même pas au sommet !

ETAPE 6 : Organiser la reprise d’école, je demande un report de scolarité d’1 an, je déménage en région PACA avec 2 loulous de 2 ans et 4 ans.

ETAPE 7 : Survivre aux études, trouver des stages, rédiger un mémoire et me faire de super copines ! 3 Années intenses où j’ai découvert le plus beau métier du monde et des amies sincères que j’adore.

Revenons au côté scolaire : 15/20 au mémoire….Pas mal pour une mère de 2 enfants, « débile » avec des troubles dys (sans aucun aménagement). »idei

Aujourd’hui, j’ai 44 ans, je suis psychomotricienne depuis plus de 6 ans. J’ai rencontré beaucoup d’enfants et d’adolescent avec des handicaps différents. Quand je joue avec eux pour les accompagner dans leur rééducation, que je discute, ils me renvoient à toutes les souffrances que j’ai vécu enfant. Le discours des parents ne me semble pas différent d’il y a plus de 30 ans…

Je me suis demandé ce qui avait évolué dans la société et l’accompagnement des enfants et adolescents en situation de handicap. J’ai cherché, j’ai découvert énormément de structures d’aide, d’accompagnement, de solutions. Nous avons de la chance en France. Cependant la SOUFFRANCE reste le mot central que cela soit pour les enfants, pour les parents et même pour les professionnels et organisation.

On voit beaucoup de témoignages de personnes en situation de handicap qui ont « réussit ». Aujourd’hui je ne qualifierais pas ma vie de réussie. C’est ma vie, avec des hauts, des bas, des grandes souffrances et d’immenses bonheurs. Si vous me dites qu’il a fallu du courage pour passer toutes les étapes, je vous répondrais : est-ce que j’ai eu le choix ?

« C’est une vie épuisante parfois et cette souffrance je ne la souhaite à personne »

Voilà les raisons qui m’ont poussé à créer la fresque Jeunesse Handicap.

Voilà les raisons qui me motivent chaque jour à travailler pour l’association SolAir.

Je rêve que l’on change le regard porté sur le handicap et sur la différence, dès le plus jeune âge.

Je crois de tout mon cœur, que l’on peut accompagner les jeunes pour qu’ils aient un parcours scolaire et de vie leur permettant d’exprimer tout leur potentiel.

Je sais que les professionnels et les parents souhaitent le meilleur pour leur / les enfants, donc on peut être nombreux pour réussir ce challenge.

Je suis persuadée que l’on peut changer les paradigmes de l’accompagnement des jeunes en situation de handicap, quelle que soit la pathologie et recréer de l’engagement, du lien humain entre tous les écosystèmes.

Pour soutenir ce travail partagez, likez, adhérez, faite un don et surtout faite nous entrer dans les écoles,  centres sociaux et de loisirs, etc….Nous souhaitons intervenir dans tous les lieux d’accompagnement des jeunes entre 3 à 25 ans pour avancer collectivement sur le sujet de l’INCLUSION.

Nous voulons vraiment recréer du lien entre tous les écosystèmes, mettre en lumière la diversité des points de vue et trouver des solutions adaptées aux organisations. ACTION !

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